Il y a trois semaines, intrigué par un message identi.ca de
rom1v, je lis un article sur
Le Point intitulé « Comment Windows a changé notre vie ». Et comme souvent
lorsque je trouve qu'un article montre un peu trop clairement ses limites, je
laisse un commentaire.
En effet, l'article du Point est exempt de toute analyse et critique et se
borne à une espèce de publi-communiqué à base de « D'abord il y a eu
Windows 3.1, puis la révolution Windows 95. Après, Windows XP est une
révolution incroyable, mais Vista marche pas tip-top. Oh la la, heureusement,
finalement, tout va bien, tout le monde aime bien Seven maintenant. ».
Rideau, circulez, y'a rien à voir. Et surtout pas de questions à se poser,
du type :
- Windows a-t-il amélioré la vie des gens ou l'a-t-il juste
changée ?
- Les gens sont-ils plus éduqués en informatique et maîtres de leurs
ordinateurs, ou moins ?
- Cette domination de plus de deux décennies est-elle légitime ?
méritée ? critiquable ? explicable ?
Bref, à la vue des réactions (dont les inévitables « Windows c'est pour
les nuls, venez sur Mac c'est bien mieux ») je laisse un commentaire, assez critique du manque d'analyse de
l'article [1] et se terminant par une invitation à lire mon
Petit vade-mecum de la technologie 2.0 à l'usage des
journalistes. « Ils dégageront peut-être mon auto-promotion » me
dis-je en le publiant. C'est de bonne guerre après tout.
D'ailleurs, la politique
de modération du Point est claire :
Toutes les opinions sont accueillies, dès lors qu'elles respectent les
règles de conformité à la loi et de bienséance. Ainsi ne seront pas validées
les contributions qui :
- Encourageraient un sentiment raciste, haineux, homophobe
A ce titre il
est utile de veiller à ne jamais généraliser une critique (dépréciation d'un
groupe entier, d'une profession entière
). - Attaqueraient sans argumenter, ou
argumenteraient de manière haineuse - Mettraient en cause une personne de
manière injurieuse ou diffamatoire - Alimenteraient des rumeurs, notamment sur
la vie personnelle - Seraient hors sujet - Ne s'adresseraient qu'à un autre
lecteur en particulier, sans que les autres lecteurs puissent trouver matière à
réfléchir.
Pour améliorer la lisibilité des réactions, les modérateurs veillent à
lisser les erreurs d'expression (orthographe, typographie
) mais ne peuvent
tout rectifier. Les réactions entièrement formulées en lettres capitales
(majuscules) ou en langage abrégé seront supprimées.
Il arrive que les modérateurs suppriment un mot ou un bref passage dans
une réaction (la suppression est figurée pas les crochets :
). Leur souci est de laisser vivre le plus possible les
paroles d'internautes. Les suppressions ne doivent pas modifier le sens
général de la réaction. Si vous en êtes mécontents, vous pouvez
toujours demander la suppression totale de votre réaction. Le très petit nombre
de cas de mécontentement observé jusqu'à présent nous conduit à pérenniser la
pratique.
Conscients de la haute qualité des contributions des lecteurs, les
modérateurs ont le souci permanent de les mettre en valeur. Des améliorations
de la mise en page sont en cours de développement.
(La mise en exergue des différents éléments qui nous intéressent ici est de
moi.)
En fait non, c'est plus simple, ils dégageront tout simplement tous les
passages de mon pauvre commentaire un tant soi peu critiques de l'article et de
son côté publicitaire.
Grande classe.
Mécontent des coupes effectuées, qui à mon sens « modifient le sens
général de la réaction » (on passe d'un commentaire critique de l'article
à une simple réponse aux autres commentaires), je décide de contacter le
modérateur par mail, selon l'adresse disponible sur le site pour leur indiquer
mon mécontentement en leur demander ce qu'ils proposent comme solution (la
seule évoquée dans la politique de modération est le retrait pur et simple du
commentaire).
Pas de réponse.
Ils doivent être débordés après tout, me dis-je, je vais leur écrire de
nouveau.
Toujours pas de réponse.
Évidemment, on comprend mieux en quoi « Le très petit nombre de cas
de mécontentement observé jusqu'à présent nous conduit à pérenniser la
pratique. » si les mécontentements sont purement et simplement
ignorés.
Tout le monde est satisfait ! D'ailleurs, 100% des personnes
satisfaites ont été interrogées !
J'ai envoyé un troisième mail, lui aussi resté lettre morte.
Je trouve en tout cas cette pratique dégueulasse, vous l'aurez deviné. De
plus, ça ne fait que confirmer l'image déjà médiocre que j'ai des « news
magazine » à la française, et du journalisme-faux-4è-pouvoir tel qu'il
existe à l'heure actuelle (avec quelques heureuses exceptions).
Ce qui me paraît le plus incroyable en outre, c'est comme des journalistes
peuvent refuser toute critique, au point de censurer un pauvre commentaire qui
serait de toute façon passé inaperçu (un partisan du logiciel libre qui vient
défendre son dada dans les commentaires d'un article sur Microsoft, c'est d'un
banal). Non, au lieu de laisser couler et de voir le commentaire disparaître
dans le nombre, l'égo de certains (ou est-ce autre chose ?) fait apparaître un
manque de respect de la liberté d'expression et conduit un blogueur parmi tant
d'autres à se sentir personnellement censuré, et donc à vouloir obtenir justice
en prenant le temps d'écrire un article, là où il aurait probablement oublié
avoir écrit ledit commentaire deux jours plus tard.
Barbara Streisand, si tu nous lis…